Les forêts sont les poumons de notre planète.
Elles stockent le CO2 et abritent 80 % de la biodiversité mondiale.
Lors de la conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP 26) en novembre 2021 à Glasgow, plus de 140 chefs d’État et gouvernement (dont la Commission européenne et la France) se sont engagés dans une déclaration solennelle sur la lutte contre la déforestation et l’utilisation des terres « à travailler collectivement pour stopper et inverser la perte de forêts et la dégradation des sols d’ici 2030 […] ».
En effet, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) estime qu’entre 1990 et 2020, 420 millions d’hectares de forêt auraient été abattus. Selon un étude de WWF, l’Union européenne reste en 2021 le deuxième plus grand importateur de matières premières liées à la déforestation. Les importations de l’Union européenne – notamment de bœuf, de bois, d’huile de palme, de soja, de café et de cacao – sont à l’origine d’environ 16 % de la déforestation liée au commerce mondial.
Cette année encore la déforestation en Amazonie atteint des records avec près de 4 000 kilomètres carrés de forêts détruits en 6 mois.
La lutte contre la déforestation est une priorité.
Le règlement de l’Union européenne sur le bois : acte pionnier pour la lutte contre la déforestation importée
Le règlement de l’Union européenne sur le bois n° 995-2010 (RBUE) est un texte fondateur fixant des obligations aux opérateurs mettant du bois et des produits dérivés de bois sur le marché. Le RBUE pose :
- une obligation de résultat : « la mise sur le marché de bois issu d’une récolte illégale ou de produits dérivés issus de ce bois est interdite. » ;
- une obligation de moyens : les opérateurs doivent « faire diligence lorsqu’ils mettent sur le marché du bois ou des produits dérivés. ».
Les opérateurs doivent ainsi mettre en place un système de diligence raisonnée contenant les mesures et procédures visant à réduire le risque de mise sur le marché de bois ou produits dérivés de bois issus de récoltes illégales.
Adoption par le Parlement de sa position sur la proposition de règlement de la Commission européenne
Le 13 septembre 2022, le Parlement européen a adopté avec une large majorité (453 voix pour, 57 voix contre et 123 abstentions) sa position sur la proposition de règlement de la Commission européenne relatif à la mise à disposition sur le marché de l’UE ainsi qu’à l’exportation à partir de l’UE de certains produits de base et produits associés à la déforestation et à la dégradation des forêts et abrogeant le règlement (UE) nº 995/2010.
« Ce vote est un oui clair : un oui à la protection des forêts, des savanes et des droits des peuples autochtones, et un oui aux appels des citoyens de l’UE qui ne veulent pas alimenter la destruction de la nature par leur consommation », s’est réjoui Anke Schulmeister-Oldenhove, spécialiste des forêts au sein du bureau européen du Fonds mondial pour la nature (WWF).
Ce texte a un objectif très précis : réduire l’incidence de la consommation et de la production de l’Union européenne sur la déforestation et la dégradation des forêts dans le monde.
De par ce texte, les opérateurs et commerçants, autres que les PMEs, devraient veiller à ce que le risque de mise sur le marché de produits de base telles que les bovins, le bois, l’huile de palme, le soja, le cacao ou le café ou de produits en cause non conformes soit négligeable.
Les produits en cause sont les produits qui contiennent des produits de base ou qui ont été fabriqués à partir de ceux-ci, ou qui proviennent d’animaux alimentés avec les produits de base.
Un devoir de traçabilité élargi s’impose ainsi aux opérateurs et commerçants.
Nouvelles conditions pour la mise sur le marché de produits de base ou de produits en cause
Ces produits ne pourraient être mis sur le marché que si les conditions suivantes sont remplies :
- « légalité » : les produits doivent être conformes au droit et aux normes en vigueur ;
- « zéro déforestation » : les produits doivent avoir été produits sur des terres exempt de déforestation, dégradation ou conversion des forêts ;
- déclaration de diligence raisonnée : une déclaration de diligence raisonnée doit avoir été effectuée comprenant les mesures prises pour vérifier la conformité des produits, des éléments justifiant l’évaluation d’un risque nul ou négligeable et des informations sur le produit.
Un champ d’application élargi de la proposition de règlement
La position adoptée par le Parlement européen renforce la proposition de la Commission de novembre 2021 en élargissant son champ d’application.
Ainsi,
– de nouveaux types de produits sont désormais visés par le texte. En effet, la proposition de la Commission européenne couvrait : le soja, huile de palme, cacao, café, bois, bœuf et plusieurs produits dérivés (chocolat, cuir et meubles) et le Parlement européen ajoute à cette liste : la viande de porc, ovins et caprins, volaille, le maïs et le caoutchouc, ainsi que le charbon de bois et les produits en papier imprimé ;
– le Parlement européen ajoute parmi les acteurs concernés les établissements financiers. En effet, le texte s’appliquerait également aux établissements financiers, dès lors que leurs services sont susceptibles de soutenir des activités directement ou indirectement liées à la déforestation, dégradation et conversion des forêts ;
– au-delà des forêts, le Parlement inclut les « autres surfaces boisées » et notamment les savanes dans le champ de protection de ce texte.
Le processus législatif européen continue et le texte final devrait entrer en vigueur début 2024.
Espérons que ce texte soit à la hauteur des enjeux.
ARCA intervient en droit pénal de l’environnement au côté de tous les acteurs luttant contre les délits forestiers et contre la déforestation.